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Comment la diversité du génome raconte l’histoire des plantes cultivées

Après les génomes du riz, du cacaoyer, du bananier, des agrumes, du caféier arabica, le génome complexe de la canne à sucre est enfin décrypté. Un article publié dans la revue Nature début 2024 a révélé, que suite à un énorme travail de recherche impliquant plusieurs équipes de scientifiques de 4 pays, plusieurs espèces domestiquées se sont croisées et sont à l'origine des variétés de canne à sucre actuellement cultivées dans le monde. Ces résultats marquent le début d'une série d'articles publiés dans The Conversation à l'occasion des 40 ans du Cirad.

40 ans de recherche génomique sur les plantes

C’est pourquoi le Cirad a fondé le laboratoire d’analyse du génome des espèces tropicales dès 1986, devenu plus tard Grand plateau technique régional de génotypage. Les équipes ont produit les premières cartes génétiques puis, grâce au dispositif national de génomique, notamment le Génoscope, et à diverses collaborations internationales, elles ont créé l’événement dans les années 2010 en inscrivant plusieurs plantes tropicales au premier rang des modèles biologiques, comme le cacaoyer, le bananier et les agrumes. La liste s’est allongée ces dernières années avec le caféier arabica, le vanillier et bien sûr la canne à sucre. Aujourd’hui, des avancées sont en cours pour le cocotier, l’hévéa, le palmier à huile, l’igname, l’arachide et le sorgho, ou encore le fonio, étendant ainsi la vague génomique à des plantes indigènes. Ces informations permettent, pour les plantes dont les variétés s’entrecroisent facilement, de repérer les séquences associées à des caractères agronomiques importants – au champ ou pour la transformation et la consommation. L’enjeu est de pouvoir ensuite les privilégier dans les brassages que les sélectionneurs – ces créateurs de nouvelles variétés – opèrent avant de trier les descendants en conditions de culture. Pour d’autres espèces, le brassage est plus lent, plus aléatoire. Il est parfois ponctué de combinaisons improbables, presque miraculeuses. Les scientifiques ont ainsi pu mettre en lumière les hybridations surprises que des humains attentifs avaient su identifier : bananes dessert, bananes plantain, orange, citron, clémentine, pomelo, ou encore caféier arabica.

Ces travaux sont réalisés, en collaboration avec INRAE et l’IRD et en lien avec des réseaux de recherche internationaux ou des structures privées. Les collections de ressources biologiques entretenues et conservées dans les CRB apportent les ressources nécessaires, sous forme de graines, de cellules cryogénisées ou encore de plantes entières à Montpellier, en Corse, en Guadeloupe, en Guyane et à La Réunion.  Ces activités sont coûteuses, mais représentent un investissement essentiel pour l’avenir. 

L’exploration de la diversité génomique répond d’abord à un défi environnemental, le changement climatique, qui oblige à accélérer l’adaptation des plantes à des contextes spécifiques – les différentes zones de culture –, contrastés et très évolutifs, en interactions proches avec les producteurs. Mais elle porte aussi un enjeu sociétal : il est indispensable d’assurer l’accès à l’information afin que tous les humains puissent se l’approprier, adapter leurs cultures et continuer à se nourrir de manière durable. 

ContactsJean-Christophe Glaszmann, Claire Billot, Claire Lanaud

Référence : 
Healey A.L. and col, 2024 The complex polyploid genome architecture of sugarcane, Nature volume 628, pages 804–810 (2024), DOI:10.1038/s41586-024-07231-4